Franck Carpentier

VTC, coursiers, livreurs : comment obtenir la requalification en CDI ?

Take eat easy et Uber sont des entreprises pour lesquels les coursiers, livreurs et VTC on obtenu la requalification en CDI.

Nous vous proposons de faire le point sur les conditions auxquelles vous pouvez prétendre à un CDI.

Rappel des critères du contrat de travail

La loi ne définit pas ce qu’est un contrat de travail. En effet, c’est le juge qui en a posé les contours. Il se définit comme une convention par laquelle une personne met son activité au service d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place contre une rémunération.

Il y a donc trois critères cumulatifs qui caractérisent un contrat de travail :

  • Une prestation
  • Une rémunération
  • Un lien de subordination

La prestation

Il s’agit de l’activité que vous exercez pour le compte d’une autre personne : conduire un véhicule ou livrer des plats cuisinés par exemple.

Les juges vont apprécier alors concrètement si la personne exerce une ou des activités pour le service d’une autre.

La rémunération

De plus, le contrat de travail suppose, pour exister, le versement d’une rémunération.

Le plus souvent, la rémunération prend la forme d’une somme d’argent. Pour les coursiers ou chauffeurs, il s’agit simplement des sommes perçues par l’intermédiaire de la plateforme.

Néanmoins, la rémunération peut également être « en nature ». En effet, il a été jugé que la prise en charge du loyer d’une personne est un élément de rémunération.

Le lien de subordination

Il s’agit de l’élément central lorsque l’on cherche à caractériser l’existence d’un CDI.

Cette notion de subordination n’est pas économique mais juridique.

  • Le pouvoir de donner des ordres et des directives ;
  • Le pouvoir d’en contrôler l’exécution ;
  • Le pouvoir d’en sanctionner les manquements.
Le pouvoir de donner des ordres et des directives

Il convient de collecter des indices qui caractérisent ce pouvoir de direction :

  • Un règlement intérieur ;
  • Le respect d’horaires précis ;
  • La fixation d’objectifs ;
  • L’obligation de suivre un itinéraire précis ;
  • Etc.
Le pouvoir de contrôler

Il s’agit là de tout dispositif permettant de vérifier comment la personne réalise les tâches qui lui sont confiées.

  • Système de pointage ;
  • Notation des personnes ;
  • Suivi GPS des itinéraires ;
  • Etc.
Le pouvoir de sanction

Il s’agit de tout mécanisme qui permet de sanctionner la personne : 

  • Déconnexion de l’application ;
  • Baisse de la rémunération ;
  • Courriel de mise en demeure ou d’avertissement ;
  • Etc.

La requalification pour les VTC, coursiers, livreurs, etc.

Take Eat Easy : le cas des coursiers

Le 28 novembre 2018, la Cour de cassation est venue affirmer que ces critères doivent s’appliquer strictement.

En effet, le recours aux auto-entrepreneurs ne doit pas être du salariat déguisé.

Ainsi, pour la société Take Eat Easy, la chambre social a retenu les éléments suivants :

  • Existence d’un système de géolocalisation permettant de surveiller en permanence les coursiers ;
  • Existence d’un système de pénalités avec déconnexion.

Le point central concerne en effet la question du lien de subordination.

La prestation est facilement identifiable (la livraison), de même que la rémunération (les commissions perçues).

La juridiction relève que les livreurs n’étaient aucunement libres dans leur activité. Ils devaient respecter un itinéraire prédéterminé. De plus, ils ne pouvaient s’en affranchir sans être sanctionnés.

Au regard de ces éléments, le contrat devait être requalifié en CDI.

Vous trouverez la note de la Cour de cassation à l’adresse suivante : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/1737_28_40778.html

Uber : le cas des chauffeurs.

Le 4 mars 2020, la Cour de cassation s’est prononcée sur le cas d’un chauffeur UBER avec la formule suivante : « le fait de pouvoir choisir ses jours et heures de travail n’exclut pas en soi une relation de travail subordonnée dès lors que lorsqu’un chauffeur se connecte à la plateforme Uber, il intègre un service organisé par la société Uber BV« .

La chambre sociale a ainsi relevé que le chauffeur s’inscrit dans un service organisé, ce qui est un indice important du lien de subordination.

La juridiction a notamment relevé trois points précis afin de caractériser l’existence d’un CDI : 

  • La fixation des tarifs par Uber ;
  • La détermination des conditions d’exercice par Uber ;
  • Le pouvoir de sanction dont dispose Uber.

Ici encore, il apparaît que les conditions d’exercice de la prestation sont déterminantes et justifient la requalification.

Vous trouverez la note de la Cour de cassation à l’adresse suivante : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/notes_explicatives_7002/relative_arret_44525.html

D’autres procédures sont en cours

Nous avons beaucoup parlé des travailleurs essentiels à la vie de la Nation depuis le début de la pandémie.

Les livreurs et chauffeurs ont montré qu’ils comptaient pleinement parmi ces personnes.

De nombreuses actions devant les juridictions du fond sont en cours concernant, par exemple, Deliveroo ou encore Click and Walk.

Nous sommes à vos côtés pour vous accompagner dans la défense de vos droits.